Éditer un poète manceau des années 1590, jeune élève des Jésuites passionné de tragédie, de mythologie, de traditions homériques et d’art de la versification, pourrait paraître stérile à double titre. Le seul texte qu’on possède de lui ne parvint jamais à l’impression et son manuscrit est un exemplaire unique, apparemment moins destiné à la réception d’un public de lecteurs ou d’acteurs qu’à un exercice particulier. Quand on le lit, on se rend compte que l’auteur condense la vaste matière troyenne qu’il exploite dans une poésie particulièrement chargée: chargée de références mythologiques et d’emprunts aux textes de ses contemporains. Ses emprunts sont parfois si fidèles, qu’ils pourraient révéler qu’une composition scolaire est à l’origine de la rédaction: la Tragédie de Pyrrhe qui en est le résultat honore ou reproduit – selon la perspective qu’on veut adopter – André de Rivaudeau, Pierre Matthieu, et surtout l’œuvre éminente de Robert Garnier. L’œil au texte des Tragédies que, par exemple, Garnier avait revues pour l’édition de 1585, le jeune Luc Percheron aurait pu montrer son admiration pour le grand dramaturge manceau en apprenti poète, par un essai dans l’art du théâtre classique: Garnier venait de mourir, en 1590, et le manuscrit de Pyrrhe date du 2 avril 1592. Or, le regard posé surtout à la christianisation de l’héritage classique, une fonction pédagogique relie la Tragédie de Pyrrhe aux caractéristiques essentielles du théâtre jésuite. Sur la base du modèle humaniste, un élan apologétique et édifiant inscrivait le théâtre dans la plus vaste mission de conversion chrétienne: conversion dans le sens de corroboration de la foi des acteurs et du public – des spectateurs ou des lecteurs –, par la transformation de l’univers de référence de l’histoire tragique. Une tragédie de Pyrrhe ainsi ‘transformée’ pouvait donc représenter pour l’élève Percheron une belle démonstration de réussite, valorisante pour lui et pour le parcours que l’imaginaire mythologique devait accomplir dans les Lettres de l’époque.

Luc PERCHERON, Pyrrhe, texte édité et présenté par Anna Bettoni

Bettoni Anna
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Abstract

Éditer un poète manceau des années 1590, jeune élève des Jésuites passionné de tragédie, de mythologie, de traditions homériques et d’art de la versification, pourrait paraître stérile à double titre. Le seul texte qu’on possède de lui ne parvint jamais à l’impression et son manuscrit est un exemplaire unique, apparemment moins destiné à la réception d’un public de lecteurs ou d’acteurs qu’à un exercice particulier. Quand on le lit, on se rend compte que l’auteur condense la vaste matière troyenne qu’il exploite dans une poésie particulièrement chargée: chargée de références mythologiques et d’emprunts aux textes de ses contemporains. Ses emprunts sont parfois si fidèles, qu’ils pourraient révéler qu’une composition scolaire est à l’origine de la rédaction: la Tragédie de Pyrrhe qui en est le résultat honore ou reproduit – selon la perspective qu’on veut adopter – André de Rivaudeau, Pierre Matthieu, et surtout l’œuvre éminente de Robert Garnier. L’œil au texte des Tragédies que, par exemple, Garnier avait revues pour l’édition de 1585, le jeune Luc Percheron aurait pu montrer son admiration pour le grand dramaturge manceau en apprenti poète, par un essai dans l’art du théâtre classique: Garnier venait de mourir, en 1590, et le manuscrit de Pyrrhe date du 2 avril 1592. Or, le regard posé surtout à la christianisation de l’héritage classique, une fonction pédagogique relie la Tragédie de Pyrrhe aux caractéristiques essentielles du théâtre jésuite. Sur la base du modèle humaniste, un élan apologétique et édifiant inscrivait le théâtre dans la plus vaste mission de conversion chrétienne: conversion dans le sens de corroboration de la foi des acteurs et du public – des spectateurs ou des lecteurs –, par la transformation de l’univers de référence de l’histoire tragique. Une tragédie de Pyrrhe ainsi ‘transformée’ pouvait donc représenter pour l’élève Percheron une belle démonstration de réussite, valorisante pour lui et pour le parcours que l’imaginaire mythologique devait accomplir dans les Lettres de l’époque.
In corso di stampa
9788822269126
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